Des chercheurs en neurosciences étudient actuellement comment l’architecture des villes modernes pourrait avoir un impact sur notre santé, notamment mentale. Leurs résultats pourraient venir révolutionner la façon dont nous concevons les villes, à condition d’une véritable prise de conscience collective.
Les progrès de la science sur la compréhension de notre fonctionnement nous font parfois apparaître des éléments qui n’ont pas été suffisamment pris en compte par le passé. Ainsi, trop souvent, la construction des villes modernes a privilégié l’efficacité économique, faisant la part belle aux voitures, aux commerces et à l’industrie et négligeant d’autres aspects, comme la beauté. Mais de plus en plus, des études se penchent sur l’éventualité que cette austérité esthétique puisse avoir un impact réel sur notre santé, notamment mentale, comme l’explique le magazine américain Wired .
L’architecture au crible des neurosciences
Tout part ici du constat que l’urbanisation semble toujours s’accompagner d’une explosion des cas de dépression, de cancer et de diabète. Si plein d’autres facteurs que la beauté peuvent venir expliquer ce phénomène, l’auteure et activiste américaine Jane Jacobs et l’architecte danois Jan Gehl avaient suggéré dès la seconde moitié du XXe siècle que la façon même dont les villes étaient conçues pouvait avoir un impact réel sur ses habitants.
Cette base de réflexion a donné l’idée à plusieurs équipes de recherche d’utiliser les nouvelles techniques en matière de cartographie cérébrale et d’étude comportementale pour voir ce qu’il en est réellement. Le laboratoire des réalités urbaines de Colin Ellard, à l’université de Waterloo (Canada) a par exemple lancé le projet eMOTIONAL Cities dans plusieurs villes américaines et européennes afin d’étudier les liens entre architecture et fonctionnement cérébral. Deux études sur les réactions psychologiques des gens face à différentes façades de bâtiments sont également en cours et doivent notamment déterminer si certaines façades peuvent entraîner une neuroinflammation.
Vers une révolution ?
Certains n’ont toutefois pas attendu les résultats de ces recherches pour tenter d’innover en la matière. C’est le cas du cabinet d’architecture danois NORD Architects, en charge de la construction du village Alzheimer à Dax (Landes). Pour concevoir leur village visant à faciliter la vie des personnes en déclin cognitif, ils se sont inspirés de la forme des bastides, ces cités médiévales closes proposant une architecture dans laquelle il serait plus facile de se repérer.
Reste qu’il faudra plus que quelques études et initiatives individuelles pour véritablement initier un changement, dans le cas où des liens réels entre architecture et santé publique seraient identifiés. Rokhsana Fiaz, la maire de Newham, dans l’est de Londres (Royaume-Uni), a déjà surpris en faisant du bonheur et de la santé deux de ses principaux indicateurs de performance de sa stratégie économique. Au-delà, les découvertes neuro-architecturales pourraient être ensuite associées à l’intelligence artificielle pour faciliter le déploiement de politiques d’urbanisme et de construction intégrant les questions de santé publique.
2025-01-06T16:05:28Z